Le Conseil municipal d'avril a adopté à une majorité élargie le projet de Budget 2023 de la Ville de Chartres : taux de fiscalité stables, priorité maintenue à l'investissement, dette maîtrisée. Les explications de Franck Masselus, adjoint en charge des Finances.
Votre Ville : Vous avez souligné devant le Conseil que l'élaboration de ce Budget a été un exercice difficile…
Franck Masselus : À la différence de l'État, les collectivités sont obligées de présenter leur budget en équilibre. Or tous les Chartrains, parce qu'ils le vivent, voient que l'inflation généralisée depuis deux ans a impacté et impacte encore fortement nos coûts de fonctionnement : hausse légitime des traitements des personnels, augmentation des coûts de maintenance, des travaux, des énergies, des taux d'emprunt, etc.
Cette année, l'État y a ajouté deux contraintes supplémentaires.
La première est réelle : la Dotation globale de fonctionnement (DGF) baisse encore de 30 000 euros. Vous me direz que ce n'est pas beaucoup, mais cela vient encore aggraver la perte brutale de ressources que nous subissons depuis 2014. Celle-ci s'est plus ou moins stabilisée depuis 2017, avec toutefois une tendance modérée mais continue à la baisse.
La deuxième pend au-dessus de nos têtes comme une épée de Damoclès : l'État a annoncé que les villes dont les dépenses de fonctionnement dépassent les 40 millions d'euros ne devraient pas les augmenter cette année de plus de 3,7 %, sous peine de pénalités financières. 3,7 %, c'est moins que l'inflation. L'État veut donc nous obliger à baisser nos dépenses de fonctionnement alors que nos coûts de fonctionnement augmentent à cause de cette même inflation.
Je rappelle que Chartres n'a bénéficié et ne bénéficie d'aucun bouclier tarifaire. Et l'État lui-même aggrave l'inflation financière par une inflation normative (la transition écologique a souvent bon dos), qui elle-même renchérit nos coûts.
Cette contrainte potentielle de 3,7 %, qui pèse sur nos dépenses de fonctionnement, n'est pas encore votée par le Parlement, mais nous avons prudemment choisi de l'intégrer d'ores et déjà dans la construction de notre budget.
Se pose enfin une question civique : depuis la suppression de la taxe d'habitation, il n'existe plus de lien évident entre le citoyen-contribuable, qui n'est pas propriétaire, et le niveau de service que lui offre la Ville. Est-ce bien normal ?
VV : Comment avez-vous tenu compte de ces contraintes supplémentaires ?
FM : C'est très clair : nous avons rationalisé encore davantage nos dépenses. Nous avons responsabilisé les utilisateurs : les services de la Ville bien évidemment, mais aussi les associations qui comprennent parfaitement la dureté des temps. Il va nous falloir également surveiller plus que d'habitude l'exécution de ce budget tout au long de l'année et anticiper d'éventuelles baisses de ressources qui pèseront non seulement sur l'année en cours mais aussi sur la suivante. Les institutions financières, et parmi elles les banques qui sont nos partenaires, nous annoncent déjà une baisse sensible des droits de mutations versés aux collectivités, en raison de la diminution en cours du nombre des transactions immobilières.
VV : Malgré cela, vous affichez le maintien de votre priorité à l'investissement ?
FM : C'est notre priorité constante depuis plus de vingt ans. Lorsque j'ai rendu compte dans ce journal du Débat d'orientations budgétaires, j'ai expliqué que les investissements restaient non seulement un facteur majeur d'attractivité de la ville, mais aussi une bonne méthode de lutte contre les conséquences de l'inflation, une vraie contribution au maintien de l'activité économique et à l'emploi dans l'agglomération. Sans oublier l'objectif principal : offrir de meilleurs et de nouveaux équipements et services publics aux Chartrains.
VV : Les taux de la fiscalité locale resteront-ils stables ?
FM : Le maire de Chartres et notre équipe municipale entendent rester fidèles à leurs engagements de mandat. Le taux de la taxe foncière ne bougera pas. Si les Chartrains constatent une augmentation de leur facture fiscale, ce sera dû à l'augmentation des bases de cet impôt sur lesquelles nous appliquons nos taux inchangés. Cette année, le Gouvernement et le Parlement augmentent ces bases de 7 %. Ils les avaient augmentées de 1 % et de 3 % lors des années précédentes, soit moins et même nettement moins que l'inflation. Nous verrons ce qu'il en sera cette année…
VV : Parviendrez-vous à maintenir la dette à un niveau acceptable ?
FM : Avec le niveau élevé des investissements, c'est l'autre preuve de qualité d'un budget. Malgré le choc brutal de l'inflation, pas question de recourir à l'emprunt pour payer le fonctionnement de la Ville et les traitements de nos personnels, comme c'était le cas par exemple avant 2001. L'emprunt doit aller seulement à l'investissement. Comme toujours le poids d'une dette se mesure à la capacité de son remboursement par l'emprunteur. Si nous arrêtions d'investir, il nous faudrait un peu plus de dix ans pour la rembourser. Notre programmation budgétaire prévoit de réduire ce ratio à un peu plus de huit ans en 2025. Notre gestion inspire confiance à nos partenaires financiers, publics et privés, qui continuent de soutenir pleinement tous nos projets.