Actualités de la Ville de Chartres

Outils et services

Outils et services

Où va Chartres ? – Interview de Jean-Pierre Gorges

Jean-Pierre Gorges, maire de Chartres, et des photos de la villeUrbanisme

03 mai 2022

Le maire, Jean-Pierre Gorges, explique comment son équipe et lui vont continuer de transformer la Ville tout en restant fidèle à son histoire, afin de la rendre toujours plus agréable à vivre et attractive.


Votre Ville : Comment projetez-vous l'évolution de Chartres ?

Jean-Pierre Gorges : Après les élections législatives, nous aurons devant nous quelques années sans élection, si tout se passe normalement. Cela ne veut pas dire que le contexte général sera facile, loin de là.

À Chartres, nous voulons continuer de transformer la ville en restant fidèle à son histoire. Certains, pour nous féliciter ou pour nous critiquer, célèbrent ou montrent du doigt tel ou tel équipement spectaculaire. Quand vous construisez l'Odyssée, certains regardent le doigt au lieu de regarder la lune, selon l'image bien connue. L'équipement leur paraît démesuré. Pourtant, quelques années après, il nous faut l'agrandir : nous avions anticipé l'élargissement de Chartres métropole.

Ce qui était vrai pour l'Odyssée, il n'y a pas de raison que ce soit moins vrai pour le Pôle administratif, le Pôle Gare, le parc des Expositions ou le Complexe culturel et sportif. Voir à 20 ans devant nous, c'est cela le développement véritablement durable. C'est autrement plus complexe que de prétendre changer le climat des Chartrains en plantant 3 arbres et 4 fougères au milieu d'une place historique.

Bien sûr que des arbres embellissent la ville, et nous en plantons d'ailleurs beaucoup. Et nous continuerons d'en mettre partout où c'est possible, mais des arbres d'ornementation, ou même des arbres fruitiers, pourquoi pas. Car cela participe de la qualité, de l'agrément d'une ville. C'est ce qui fait que les habitants sont heureux d'y vivre et que d'autres, des particuliers comme des entreprises et leurs emplois, ont envie de venir s'y installer.

VV : Le développement économique n'est pas, à vos yeux, le facteur premier ?

JPG : Je le dis toujours, tout part des gens. De la démographie. Quand nous avons construit en 2005 notre premier Schéma de cohérence territoriale (SCoT) nous avons dû d'abord déterminer quel en serait le fondement principal, à partir duquel organiser tout le reste. Nous avons basé ce premier SCoT de l‘agglomération chartraine sur l'augmentation prévisible de la population dans les 20 ans à venir. Depuis, nous actualisons nos chiffres régulièrement.

Nous aurions pu choisir de tout miser sur le développement économique, la seule compétence obligatoire d'une communauté d'agglomération. Mais ça aurait été une illusion. Quand certains élus clament qu'ils « font du développement économique », ils se trompent. C'est parce qu'une ville ou une agglomération offre une véritable qualité de la vie, une harmonie, un équilibre, que des entreprises ont envie de s'y installer. Parce qu'une entreprise c'est d'abord une communauté humaine.

Longtemps on a prétendu que c'était le facteur fiscal qui primait, comme on disait que c'était le directeur financier qui orientait les choix de l'entreprise. Aujourd'hui on voit que le facteur fiscal n'est qu'un facteur parmi d'autres, sauf bien sûr si la fiscalité est désespérément confiscatoire. Le DRH a pris autant d'importance que le directeur financier dans les décisions du chef d'entreprise. Le facteur humain prime.

VV : Qu'est ce qui, à Chartres, vous a convaincu de vous lancer en politique ?

JPG : Chartres était, disait-on, une « belle endormie ». Mais elle était d'abord belle. Ce cadre de vie, deux fois millénaire, n'est pas délocalisable. Il fallait seulement le rendre attractif aux yeux d'un Chartrain d'aujourd'hui. Car c'était un gâchis. Chartres ne disposait d'aucun des équipements dignes d'une ville d'avenir. Tout ce que nous avons fait depuis 20 ans, c'est lui donner les grands équipements qui lui manquaient en les concevant à la mesure de la vie que les Chartrains auraient 30 ans plus tard.

Malgré les apparences, ce n'était pas une action de rupture. Il s'agissait d'abord de retrouver le chemin d'une continuité. Tout le reste, et notamment le développement économique, est venu avec. Avec la propreté, avec des transports publics modernes, avec une fiscalité personnelle qui a retrouvé un niveau raisonnable.

Avec le logement aussi. En 2001, Chartres comptait 38 % de logements sociaux. Souvent en mauvais état. Avec des locataires qui, pour beaucoup, auraient pu habiter ailleurs, dans des logements privés intermédiaires. Mais ceux-ci n'existaient pas. Et ceux qui auraient eu vraiment besoin de logements publics n'y avaient pas suffisamment accès. La fracture sociale, que l'on redécouvre en France à chaque élection présidentielle, c'est aussi et peut-être d'abord cela.

Et aujourd'hui, ceux qui habitent la Madeleine nous demandent d'aller plus vite, un peu sur le modèle de ce que nous avons fait dans le quartier voisin des Clos.

VV : C'est ce que vos budgets successifs traduisent à travers la priorité affichée pour l'investissement ?

JPG : Nous n'agissons pas au hasard. Nous nous gardons aussi des carcans de l'idéologie. Regardez : si vous croyez que l'économie est première, vous essayez d'attirer des entreprises gigantesques. Et quand l'économie change, les entreprises disparaissent. Mais les habitants restent. Sans solution. Un peu comme dans les corons du Nord, désertés après la fermeture des mines. Malgré les primes et les subventions, qui a envie de venir s'installer auprès du malheur ? C'est pour cela aussi que nous avons refusé l'installation dans le Jardin d'Entreprises d'un énorme entrepôt du commerce mondialisé.

La solution à la mondialisation, c'est la proximité. Presque toutes les entreprises de l'agglomération chartraine présentes il y a 20 ans se sont agrandies, ont investi et créé des emplois supplémentaires. Nous avons essayé de leur donner confiance et de leur faciliter le travail en leur montrant que leurs collectivités, elles aussi, avaient désormais fait le choix de l'investissement. Que leurs personnels et leurs familles auraient des écoles de qualité, une médiathèque, un cinéma moderne, un théâtre dynamique, une gare digne de ce nom, etc. Le tout forme un écosystème vivant qui attire d'autres entreprises et d'autres habitants. Et l'on construit des logements, de plus en plus et de meilleure qualité. Et d'autres communes ont envie de s'agréger à cette aventure collective qui marche. Il n'y a pas de secret.

Par comparaison, et toutes proportions gardées, regardez Paris et la Région parisienne. C'est un décor splendide, pourri par la saleté et l'insécurité. Alors, dès que l'économie change et que le numérique permet de travailler de plus loin, les habitants s'en vont. Et certains viennent ici. Ils font le choix de la qualité de la vie.

VV : Et pourtant, vous n'avez pas fini ?

JPG : C'est sans fin. L'Autricum des Carnutes gallo-romains, d'un Empire pacifié, était deux ou trois fois plus étendue que la Chartres médiévale enserrée à l'intérieur de ses murailles par besoin de sécurité. Pourtant les conditions naturelles étaient les mêmes : une plaine où les céréales venaient bien, quelques marécages, mais c'était parfait pour les moutons. Et au milieu coulait une rivière paisible qui donnait l'eau vitale et permettait le transport et les échanges de marchandises. Enfin, au-dessus, un promontoire facile à défendre, qui permettait de voir et de contrôler les territoires. Un point de repère, un sanctuaire dans tous les sens du mot. Au fond, rien n'a changé dans l'intérêt que les hommes portent à cet endroit. Mais il nous revient de l'adapter sans cesse aux nouvelles conditions de la vie et de la prospérité des habitants.

Alors, nous n'allons pas construire trois Odyssée et deux pôles administratifs supplémentaires. Mais nous allons continuer à faire évoluer les quartiers et leurs logements, y compris dans le centre-ville historique. Nous allons continuer à rendre la Ville encore plus agréable à l'œil, à apaiser la vie des Chartrains, comme nous avons commencé à le faire en réduisant la vitesse des voitures tout en supprimant progressivement les feux tricolores. Nous ne cherchons pas à supprimer la voiture, mais à la cacher dans des parkings proches des domiciles des habitants. Et vous verrez que de plus en plus de gens auront envie de devenir chartrains. Et les entreprises et leurs emplois suivront.

Continuité, cohérence et beaucoup de travail. Il nous manque un seul grand équipement stratégique, et qui permettra aussi d'apaiser la vie dans les rues de Chartres. C'est l'autoroute A154, qui nous évitera ce trafic de transit qui encombre nos rues et asphyxie matin et soir le contournement ouest de la zone urbaine. Pour le reste, notre action devient de plus en plus fine, notamment grâce aux nouvelles technologies. C'est vrai pour la consommation d'énergies, l'éclairage public, l'eau, les caméras de vidéo-protection perfectionnées qui permettent aussi de mieux suivre toutes les difficultés qui peuvent survenir dans les rues de Chartres, etc. Et une action douce, souvent indirecte, par l'appui aux associations, aux clubs sportifs, aux manifestations culturelles et aux grands évènements gratuits, fédérateurs, où tous les Chartrains peuvent se retrouver. Ensemble. Ou, comme dirait le personnage du Guépard dans le film de Visconti, « il nous faut tout changer pour que rien ne change »…

Téléchargez gratuitement l'application Chartres

Cliquer pour accéder à Google Play (nouvelle fenêtre)

Cliquer pour accéder à l'App Store (nouvelle fenêtre)

Rejoignez-nous

Facebook – Ville de Chartres     Twitter – Ville de Chartres

YouTube – Ville de Chartres    Instagram – Ville de Chartres